Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 6.djvu/203

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SUR LE R01 JEAN.. 201

la première fois on e1it’a faire valoir. ses droits" après la, mort de Richard, c’est-a-dire environ ; à douze ans. On sait qu’Arlhur en airait vingt-cinq ou vingt-six, qu’il était déjà marié et intéressant par d’aimables et brillantes qualités lorsqu’il fut fait prisonnier par son oncle ; mais le poële a senti combien ce spectacle de la faiblesse aux prises avec la cruauté était plus intéressant dans un enfant ; et d’ailleurs, si Arthur n’eût éte un enfant, re n’est pas sa mère qu’il eût été permis de mettre en avant aïsa place ; en supprimant le rôle de Constance, Shakespeare nous eût peut-être privés-de la peinture la plus pathétique qu’il ait jamais tracée de Famonr maternel, l’un des sentiments où il a été le plus profond.,

En même temps qu’il a rendu le fait plus touchant, il en a écarté l’horreur en diminuant l’atrocité du crime. L’opinion la plus généralement’répandue, c’est qu Hubert de Bourg, qui neas’était chargé

de faire périr Arthur que pour le sauver, ayant en effet trompé la cruauté de son oncle par de faux' rapports et. par un simulacre d’enterrement, Jeau, qui fut instruit de la vérité, tira d’abord Arthur du château de Falaise où il était» sous la garde d’Hubert, se rendit lui-même de nuit et par eau à Rouen oit il l’avait fait renfermer, le fit amener dans son bateau, le poignarda de sa main, puis attarha une pierre a son corps et le jeta dans la rivière. On conçoit qu’un véritable poëte ait écarté une semblable image. Indépendamment de la nécessité d’absoudre son principal personnage d’un crime aussi odieux, Shalispeare a compris combien les lâches remords de Jean, quand il voit lédanger ou le plonge le bruit de la mort de son neveu, étaient plus dramatiques et plus conformes ai la nature générale de l’homme-que cet excès d’une brutale férocité ; et, certes, la belle scène de Jean-avec Hubert, après la retraite des lords, suffit bien pour justifier un pareil choix. D’ailleurs le tableau que présente Shalispearegsaisit trop vivement son imagination et acquiert a ses yeux trop de réalité pour qu’il ne sente pas qu’après la scène incomparable’ou Arthur obtient sa grâce d’lluhert, il est imposable de supporter l’idée qu’aucun être humain porte la main sur ce pauvre enfant ; et lui fasse subir de nouveau le supplice de Tagoiiie ap laquellé il vient d’échapper ;` le poète sait de plus que le spectaçleïle la mort d’Arthur, bien que moins cruel, serait encore intolérable si, dans l’èsprit des spectateurs, il était accompagné de’l’angoisse qrfy ajouterait la pensée de Constance ; il a eu soin de nous apprendre la mort de la« mère avant de nous rendre témoin de celle du fils ; comme si, lorsque son génie a conçu, a un certain dégré, `les douleurs d’un § €ÎlÎ.lïl : 16111À0\l’d’une passionÇ son âme trop’tendre sfen