Le connétable. — Ma foi, l’autre jour il m’a semblé que votre maîtresse vous a durement mené.
Le dauphin. — Peut-être la vôtre en a fait de même.
Le connétable. — La mienne n’était pas bridée.
Le dauphin. — Elle était donc vieille et tranquille, et vous galopâtes comme un kerne d’Irlande[1], sans votre haut-de-chausse français et avec des caleçons étroits.
Le connétable. — Vous vous connaissez en équitation.
Le dauphin. — Recevez donc une leçon de moi. Ceux qui chevauchent ainsi et sans précaution tombent dans de sales fondrières : je préfère mon cheval à ma maîtresse.
Le connétable. — J’aimerais autant que ma maîtresse fût une rosse.
Le dauphin. — Je te dis, connétable, que ma maîtresse porte ses propres cheveux.
Le connétable. — Je pourrais en dire autant si j’avais une truie pour maîtresse.
Le dauphin. — Le chien est retourné à son vomissement, et la truie lavée au bourbier[2]. Tu te sers de tout.
Le connétable. — Cependant je ne me sers pas de mon cheval pour maîtresse, ou d’un pareil proverbe mal à propos.
rambure. — Seigneur connétable, sont-ce des étoiles ou des soleils qui brillent sur l’armure que j’ai vue ce soir dans votre tente ?
Le connétable. — Ce sont des étoiles.
Le dauphin. — Il en tombera quelques-unes demain, j’espère.
Le connétable. — Et cependant mon ciel n’en manquera pas encore pour cela.
Le dauphin. — Cela peut bien être, car vous en avez tant de superflues ! et cela vous ferait plus d’honneur qu’il y en eût quelques-unes de moins.
Le connétable. — C’est comme votre cheval qui porte tant de louanges, et qui n’en trotterait pas moins bien