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ACTE III, SCÈNE III.

Stephano.

Moi, monstre ? Non.

Caliban.

N’aie pas peur : l’île est remplie de bruits, de sons et de doux airs qui donnent du plaisir sans jamais faire de mal. Quelquefois des milliers d’instruments tintent confusément autour de mes oreilles ; quelquefois ce sont des voix telles que, si je m’éveillais alors après un long sommeil, elles me feraient dormir encore ; et quelquefois en rêvant, il m’a semblé voir les nuées s’ouvrir et me montrer des richesses prêtes à pleuvoir sur moi ; en sorte que lorsque je m’éveillais, je pleurais d’envie de rêver encore.

Stephano.

Cela me fera un beau royaume où j’aurai ma musique pour rien.

Caliban.

Quand Prospero sera tué.

Stephano.

C’est ce qui arrivera tout à l’heure : je n’ai pas oublié ce que tu m’as conté.

Trinculo.

Le son s’éloigne. Suivons-le, et après faisons notre besogne.

Stephano.

Guide-nous, monstre ; nous te suivons. — Je serais bien aise de voir ce tambourineur : il va bon train.

Trinculo.

Viens-tu ? — Je te suivrai, Stephano.

(Ils sortent.)



Scène III

(Une autre partie de l’île.)
Entrent ALONZO, SÉBASTIEN, ANTONIO, GONZALO, ADRIAN, FRANCISCO et autres.
Gonzalo.

Par Notre-Dame, je ne puis aller plus loin, seigneur. Mes vieux os me font mal ; c’est un vrai labyrinthe que nous avons parcouru là par tant de sentiers, droits ou tortueux. J’en jure par votre patience, j’ai besoin de me reposer.

Alonzo.

Mon vieux seigneur, je ne peux te blâmer ; je sens moi-même la lassitude tenir mes esprits dans l’engourdissement. Asseyez-vous et reposez-vous ; et moi je veux laisser ici mon espoir, et ne pas plus longtemps