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ACTE IV, SCÈNE VII.

sager jusqu’à la sortie du camp : je suis obligé de retourner à mon poste, sans quoi je l’aurais escorté moi-même… Votre général est toujours un autre Jupiter.

(Le soldat sort.)
Énobarbus.

Je suis le seul lâche de l’univers ; et je sens mon ignominie. Ô Antoine ! mine de générosité, comment aurais-tu donc payé mes services et ma fidélité, toi qui couronnes d’or mon infamie ! Ceci me fait gonfler le cœur ; et si le remords ne le brise pas bientôt, un moyen plus prompt préviendra le remords… Mais le remords s’en chargera, je le sens. — Moi, combattre contre toi ! Non : je veux aller chercher quelque fossé pour y mourir ; le plus sale est celui qui convient le mieux à la dernière heure de ma vie.

(Il sort au désespoir.)



Scène VII

Champ de bataille entre les deux camps.
(On sonne la marche. Bruits de tambours et de trompettes.)
Entrent AGRIPPA et autres.
Agrippa.

Battons en retraite : nous nous sommes engagés trop avant. César lui-même a payé de sa personne, et nous avons trouvé plus de résistance que nous n’en attendions.

(Agrippa et les siens sortent.)
(Bruit d’alarme. Entrent Antoine et Scarus blessés.)
Scarus.

Ô mon brave général ! voilà ce qui s’appelle combattre. Si nous avions commencé par là, nous les aurions renvoyés chez eux avec des torchons autour de la tête.

Antoine.

Ton sang coule à grands flots.

Scarus.

J’avais ici une blessure comme un T, maintenant c’est une H.

Antoine.

Ils battent en retraite.

Scarus.

Nous les repousserons jusque dans des trous. — J’ai encore de la place pour six blessures.

(Éros entre.)