Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/140

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HAMLET.

Pourtant, si tu veux absolument te marier, épouse un imbécile ; — car les hommes sensés savent trop bien — quels monstres vous faites d’eux. Va dans un couvent.

OFÉLIA.

Je vous prie, mon Dieu, guérissez-le !

HAMLET.

Ah ! j’ai entendu parler de vos peintures aussi ! — Dieu vous a donné un visage, — et vous vous en faites un autre vous-mêmes. — Vous sautillez, vous trottinez, Vous affublez de sobriquets — les créatures de Dieu, et vous donnez — votre galanterie pour de l’ignorance. — Morbleu ! c’est pitoyable. Je ne veux plus de cela : — cela m’a rendu fou. Je ne veux plus de mariages. — Ceux qui sont mariés déjà vivront tous, excepté un : — les autres resteront comme ils sont. Allez au couvent ! — au couvent ! allez !

Il sort.
OFÉLIA.

Dieu du ciel, quel rapide changement ! — Le courtisan ! le savant ! le soldat ! tout en lui — est brisé ! Tout a volé en éclats ! Oh ! malheur à moi ! — avoir vu ce que j’ai vu et voir ce que je vois !

Elle sort.
Entrent le Roi et Corambis.
LE ROI.

L’amour ! Non, non, ce n’est pas là la cause. — C’est quelque chose de plus profond qui le trouble.

CORAMBIS.

Sans doute, c’est quelque chose. Monseigneur, un peu de patience. — Je vais moi-même le tâter — laissez-moi faire, — je le sonderai dans tous les sens. Justement le