Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
Peste soit de lui ! il lui faut une gigue ou une histoire de mauvais lieu, — sinon il s’endort. Allons ! arrive à Hécube :
LE COMÉDIEN.

Mais celui, oh ! celui qui eût vu la reine emmitouflée…

CORAMBIS.

La reine emmitouflée est bien, très-bien, ma foi !

LE COMÉDIEN.

Se lever dans l’alarme et dans la crainte de la mort,
Ayant une couverture sur ses reins faibles et par trop fécondés,
Et un mouchoir sur cette tête où était naguère un diadème,
Celui qui eût vu cela eût, dans une apostrophe envenimée ;
Crié à la trahison ;
Car si les dieux eux-mêmes l’avaient vue alors
Qu’elle voyait Pyrrhus occupé par des coups malicieux
À émincer les membres de son époux,
Cela eût trait les larmes des yeux brûlants du ciel,
Et la passion des dieux.

CORAMBLS.

Voyez donc, monseigneur, s’il n’a pas changé de couleur ! — il a des larmes dans les yeux. Assez, brave cœur, assez !

HAMLET.

C’est bien, c’est très-bien. — De grâce, monseigneur, — veillez à ce que ces comédiens soient bien traités ; — je vous le dis, ils sont la chronique, le résumé des temps. — Mieux vaudrait pour vous, je vous assure, — une méchante épitaphe après votre mort — que leur blâme pendant votre vie.

CORAMBIS.

Monseigneur, je les traiterai conformément à leurs mérites.

HAMLET.

Oh ! beaucoup mieux, l’ami ! Traitez chacun d’après son mérite, — qui donc échappera aux étrivières ? —