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SCÈNE I.

BÉNÉDICT.

Veux-tu donc l’acheter, que tu t’informes de ce qu’elle vaut ?

CLAUDIO.

Est-ce que l’univers pourrait payer un pareil bijou ?

BÉNÉDICT.

Oui, certes, et un étui pour l’y fourrer. Ah çà ! me parles-tu avec un front grave ? ou joues-tu de l’ironie pour nous dire que Cupidon est un habile tueur de lièvres, et Vulcain un excellent charpentier ? Voyons, sur quel ton faut-il le prendre pour chanter d’accord avec toi ?

CLAUDIO.

Elle est, à mes yeux, la plus charmante femme que j’aie jamais vue.

BÉNÉDICT.

Je puis encore voir sans lunettes, et je ne vois pas cela. Tiens ! sa cousine, si elle n’était pas possédée d’une furie, l’emporterait autant sur elle en beauté que le premier mai sur le dernier jour de décembre. Mais j’espère que vous n’avez pas l’intention de tourner au mariage, n’est-ce pas ?

CLAUDIO.

Quand j’aurais juré que non, je ne répondrais pas de moi si Héro voulait être ma femme.

BÉNÉDICT.

En est-ce déjà là ? Quoi, il ne se trouvera pas un homme au monde qui tienne à mettre son chapeau sans inquiétude ! Je ne verrai jamais un célibataire de soixante ans ! Allons, soit. Puisque tu veux absolument te mettre le joug sur le cou, portes-en la marque et essouffle-toi, même les dimanches. Tiens, don Pedro revient te chercher.