— Le plus grand plaisir de la pêche est de voir le poisson — fendre le flot d’argent de ses rames d’or — et mordre avidement à l’hameçon traître. — Ainsi, nous tendons la ligne à Béatrice qui vient — de se cacher à l’ombre du chèvrefeuille. — Soyez sans crainte, je jouerai bien mon rôle dans le dialogue.
— Eh bien, rapprochons-nous d’elle, pour que son oreille ne perde rien — de la douce et perfide amorce que nous lui destinons.
— Non vraiment, Ursule, elle est trop dédaigneuse ; — crois-moi, elle est d’une humeur aussi farouche et aussi sauvage — que le faucon fauve des rochers.
Mais êtes-vous sûre — que Bénédict aime si profondément Béatrice ?
— C’est ce que disent le prince et le seigneur, mon fiancé.
— Et ils vous ont chargée de lui en parler, madame ?
— Ils m’ont priée de l’en instruire ; — mais je leur ai conseillé, s’ils aimaient Bénédict, — de l’engager à lutter contre cette affection, — sans jamais la faire connaître à Béatrice.
— Pourquoi cela ? Ce gentilhomme n’est-il pas — digne d’un lit aussi privilégié — que la couche de Béatrice ?