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NOTES.

Homère, est la maîtresse d’Achille et qu’Agamemnon fait enlever par Eurybate et Thaltybias au premier livre de l’Iliade. C’est par suite de cet enlèvement, on s’en souvient, qu’Achille furieux se renferme dans sa tente.

(5) L’apparition du Prologue en armure était une véritable innovation. D’après la coutume du théâtre anglais, il devait porter un simple manteau noir.

(6) Dans la restauration qu’il a faite de Troylus et Cressida, Dryden a complètement interverti l’ordre des trois premières scènes. Au lieu de commencer par un entretien entre Pandarus et Troïlus et par une conversation entre le même Pandarus et Cressida, la pièce corrigée commence par la délibération des chefs grecs dans la tente d’Agamemnon. Dryden a mis en tête de la pièce la scène iii, et a rejeté à la suite de cette scène les scènes i et ii qu’il a réunies en une seule. Rien n’est plus maladroit que cette transposition. Rien n’est plus contraire aux lois de la composition dramatique que Dryden vénérait tant, et que Boileau a fort bien résumées dans ce vers :

Le sujet ne peut être assez tôt expliqué.

Il y a bien deux actions dans la pièce de Shakespeare : la première relative aux amours de Troylus et de Cressida, la seconde relative à la lutte des Grecs et des Troyens. Mais, évidemment les rapport entre les Grecs et les Troyens ne forment qu’une action secondaire ; l’action principale repose tout entière sur les rapports entre Troylus, Cressida et Diomède. Telle était la pensée de Shakespeare, et le poëte l’a déclarée d’avance de deux façons, d’abord par le choix du titre, et ensuite par la disposition des scènes. En nous parlant tout d’abord de la passion de Troylus, Shakespeare nous indique clairement que cette passion est le nœud véritable de la pièce. Dryden, au contraire, commence par nous entretenir des discordes qui règnent dans le camp grec, comme si ces discordes étaient le sujet réel de l’œuvre, et comme s’il allait nous faire assister à quelque tragédie classique, imitée de l’Iliade. Ce contre sens de composition n’est pas une des moindres fautes commises par Dryden. Il a, par malheur, complètement défiguré le personnage principal de la pièce. Grâce à ses modifications, Cressida cesse d’être le type à la fois si gracieux et si redoutable que Shakespeare avait rêvé : elle n’est plus qu’une