Serait-ce vrai ? Serait-ce vrai ? Est-ce que je vous torture vraiment ? Alors, je vais y aller.
Mais tu ne bouges pas.
J’y vais immédiatement, tout droit, en un clin d’œil, aussi vite que la pensée ; pourtant vous croyez toujours qu’on ne fait pas assez pour vous : je me suis échiné à votre service. Ce matin je suis allé chez le prince Pâris pour lui demander d’excuser ce soir votre absence au souper de la cour ; et je l’ai trouvé… Ma foi, où croyez-vous que je l’ai trouvé ? Cela me réjouit le cœur, quand je pense comment je l’ai trouvé. Pourtant vous croyez qu’on ne fait jamais assez pour vous.
Voulez-vous vous en aller ! Quel rapport cela a-t-il avec Cressida ?
Comment ! Vous ne voulez pas entendre les gens… Quel rapport cela a-t-il avec Cressida ?… Eh bien ! je l’ai trouvé au lit, au lit avec Hélène, sur ma parole. C’est une charmante reine, une charmante reine, une très-charmante reine ! Mais elle n’est rien à côté de ma nièce Cressida : c’est un laideron, une gipsy, une moricaude à côté de ma nièce Cressida… Elle était couchée avec un de ses bras blancs autour du cou de ce putassier. Oh ! quel bras blanc ! blanc comme le lis ! rond ! potelé !… Il faut que vous sachiez qu’elle l’avait nu jusqu’au coude ! Et alors elle le baisait, et elle l’étreignait… comme qui dirait…
Mais, tu as beau dire, quel rapport cela a-t-il avec Cressida ?
Eh bien, j’ai fait vos excuses à votre frère Pâris ; cela a rapport à Cressida, je suppose !… Mais, quel bras ! quelle main ! quels doigts effilés ! l’autre main était sous les draps du lit ; celle-là, je ne l’ai pas vue, je l’avoue ; je n’ai pas vu cette main-là.
Tu continues de me torturer !
Mais, moi aussi j’étais torturé ; vieux comme je suis, j’étais torturé aussi ; pourtant j’ai trouvé moyen de lui faire vos excuses pour qu’il les fit à votre père… Par Jupiter ! Quand je pense à cette main-là, je suis tellement ravi que je ne sais plus ce que je dis : j’étais torturé aussi, moi !
Allons, j’y vais, j’y vais : je vais la chercher, je l’amène, je la conduis… Ne pas venir, quand je suis son oncle !
(14) Le Sagittaire était, selon Lydgate, un animal monstrueux, moitié homme et moitié cheval, comme le centaure classique.