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SCÈNE XII.
trois mille livres qui dans les derniers temps — n’a pas été acquitté par toi.
LA REINE.

Et qui, — pour tuer les étonnements futurs, — ne le sera jamais.

CLOTEN.

Il y aura bien des Césars — avant que vienne un autre Jules. La Bretagne est — un monde à elle seule ; et nous ne voulons rien payer — pour le droit de promener nos nez.

LA REINE.

Les circonstances — qui alors aidèrent les Romains à nous prendre notre bien, nous aident, — à notre tour, à le reprendre. Sire, mon suzerain ; souvenez-vous — à la fois et des rois vos ancêtres et — des résistances naturelles qu’offre votre île, — vrai parc de Neptune, hérissé, palissadé — de rochers inaccessibles, de vagues rugissantes, — de bancs de sable qui, plutôt que de soutenir les barques de vos ennemis, — les rongeraient jusqu’au grand mât ! César fît bien ici — une espèce de conquête, mais ce n’est pas ici qu’il s’est targué — d’être venu, d’avoir vu, d’avoir vaincu : un désastre, — le premier qui l’eût jamais atteint, le repoussa — de nos côtes, deux fois battu ; et ses navires, — pauvres jouets naïfs de nos terribles mers, — secoués par les lames, se brisèrent comme des coquilles d’œufs — contre nos rochers. En réjouissance, — le fameux Cassibelan, qui avait été, — ô fortune baladine ! sur le point d’abattre l’épée de César, — illumina de feux de joie la ville de Lud (5), — et enfla de courage les Bretons !…

CLOTEN.

Allons, il n’y a plus ici de tribut à payer : notre royaume est plus fort qu’il ne l’était à cette époque ; et, comme je l’ai dit, il n’y a plus de César comme celui-là :