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ANTOINE ET CLÉOPÂTRE.

ANTOINE.

— Évanouis-toi, ou je te donnerai ce que tu mérites, — et je ferai tort au triomphe de César. Qu’il te prenne — et qu’il t’expose aux acclamations des plébéiens ; suis son char, comme l’opprobre le plus grand — de tout ton sexe. Monstre prodigieux, sois exhibée — aux badauds, pour la plus chétive obole, et que — la patiente Octavie te laboure le visage — de ses ongles aiguisés !

Cléopâtre sort.

Tu as bien fait de t’enfuir, — si c’est un bien de vivre : pourtant, mieux eût valu pour toi — succomber sous ma furie, car cette mort — t’en eût épargné mille… Holà ! Éros !… — La chemise de Nessus est sur moi : ô toi, — Alcide, mon ancêtre ; enseigne-moi ta rage. — Puissé-je, moi aussi, lancer Lichas sur les cornes de la lune, — et, à l’aide de ces bras qui brandissaient la plus lourde massue, — m’anéantir héroïquement !… Cette sorcière mourra : — elle m’a vendu au marmouset romain, et je succombe — sous sa trahison : elle mourra pour cela. À moi, Éros !

Il sort.

SCÈNE XXXIV.
[Alexandrie. Dans le palais de Cléopâtre.]
Entrent Cléopâtre, Charmion, Iras et Mardian.
CLÉOPÂTRE.

— À mon secours, mes femmes ! Oh ! il est plus furieux — que le fils de Télamon frustré du bouclier d’Achille ; le sanglier de Thessalie — n’était pas plus écumant.

CHARMION.

Rendez-vous au tombeau. — Enfermez-vous là, et