Cléopâtre !
— Crois-tu qu’il puisse y avoir ou qu’il y ait jamais eu un homme — comme celui dont j’ai rêvé ?
Non, gracieuse madame.
— Vous en avez menti, à la face des dieux ! — Mais, qu’il ait existé ou qu’il doive exister jamais, — un pareil être dépasse les proportions du rêve. La nature est bien souvent impuissante — à rivaliser avec les créations merveilleuses de la pensée ; mais, en concevant — un Antoine, la nature l’emporterait sur la pensée — et condamnerait au néant toutes les fictions.
Écoutez-moi, madame : — votre perte est aussi grande que vous-même, et votre douleur — répond à son immensité. Puissé-je ne jamais — obtenir un succès désiré, s’il n’est pas vrai que — votre affliction rebondit, par contre-coup, — jusqu’au fond de mon cœur !
Je vous remercie, monsieur… — Savez-vous ce que César entend faire de moi ?
— Je répugne à vous dire ce que je voudrais que vous connussiez.
— Ah ! je vous en prie, monsieur !
Quoique César soit magnanime…