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LA SAUVAGE APPRIVOISÉE.
mes yeux sont témoins de sa légèreté, — je veux avec vous, si vous le permettez, — abjurer pour jamais Bianca et son amour.
HORTENSIO.

— Voyez-les ! que de baisers et de tendresses !… Signor Lucentio, — voici ma main : je m’engage fermement — à cesser de lui faire la cour et à la renier — comme une créature indigne des hommages — dont je l’ai follement flattée jusqu’ici.

TRANIO.

— Comme vous, je fais ici sans réticence le serment de — ne jamais l’épouser, quand elle m’en supplierait. — Foin d’elle ! Voyez quelles tendresses bestiales elle a pour lui !

HORTENSIO.

— Je voudrais que tout le monde, hormis lui, renonçât à elle. — Quant à moi, pour être plus sûr de tenir mon serment, — je veux me marier à une riche veuve, — avant que trois jours se passent ; oui, à une veuve qui n’a cessé de m’aimer — tout le temps que j’ai aimé cette fière et dédaigneuse coquette. — Et sur ce, adieu, signor Lucentio. — Dans la femme, c’est la tendresse et non la beauté extérieure — qui désormais obtiendra mon amour. Je prends donc congé de vous, résolu à faire ce que j’ai juré.

Hortensio sort. Lucentio et Bianca reviennent sur le devant de la scène.
TRANIO.

— Madame Bianca, le ciel vous accorde tous les bonheurs — que peuvent avoir les amants heureux ! — Ah ! je vous ai surprise à faire la sieste, ma mie, — et nous avons, Hortensio et moi, renoncé à vous.

BIANCA.

— Vous plaisantez, Tranio ; avez-vous vraiment renoncé à moi tous deux ?