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SCÈNE V.

Et cœtera ! Ah ! bon vieux Mantouan (41) ! je puis dire de toi ce que le voyageur dit de Venise :

Vinegia, vinegia.
Chi non te vede, ei non te pregia (42),

Vieux Mantouan ! vieux Mantouan ! Qui ne te comprend pas ne t’aime pas.

Fredonnant.

Ut, re, sol, la, mi, fa.

Pardon, monsieur, quel est le contenu de cette lettre, ou plutôt, comme dit Horace dans son… Sur mon âme, ce sont des vers !

NATHANIEL.

Oui, messire, et fort savants.

HOLOPHERNE.

Faites-m’en entendre une bribe, une strophe, un vers. Lege, domine.

NATHANIEL, lisant.

Si l’amour me rend parjure, comment puis-je jurer d’aimer ?
Ah ! les serments ne sont valables qu’adressés à la beauté !
Bien qu’à moi-même parjure, à toi je serai fidèle.
L’idée qui pour moi est un chêne, devant toi plie comme un roseau.

L’étude cessant de s’égarer fait son livre de tes yeux
Qui recèlent toutes les jouissances accessibles à l’art.
Si la connaissance est le but, te connaître doit suffire
Bien savante est la langue qui sait bien te louer !

Bien ignorante l’âme qui te voit sans surprise !
Il suffit à ma gloire d’admirer tes mérites.
L’éclair de Jupiter est dans ton regard ; sa foudre, dans ta voix
Qui, quand elle est sans colère, est musique et douce flamme.

Divine comme tu l’es, mon amour, oh ! pardonne
Si je chante le ciel dans une langue si terrestre.

HOLOPHERNE.

Vous ne faites pas sentir les apostrophes et ainsi vous