— Filons, honnêtes gens, et laissons là les traîtres.
— Chers seigneurs, chers amants, oh ! embrassons-nous ! — Nous sommes ce que peuvent être la chair et le sang. — Il faut que la mer ait son flux et son reflux, que le ciel montre sa face. — Le sang jeune ne peut pas obéir aux prescriptions de l’âge ! — nous ne pouvons pas contrarier la cause pour laquelle nous sommes nés. — Aussi a-t-il fallu à toute force que nous fussions parjures.
— Eh quoi ! la lettre que tu viens de déchirer montrait Biron amoureux !
— Vous me le demandez ! Qui donc peut voir la divine Rosaline — sans être, comme l’Indien rude et sauvage devant le premier rayon de l’Orient splendide, — obligé de courber sa tête vassale, et, brusquement ébloui, — de baiser la vile poussière avec sa poitrine humiliée ? — Quel est l’œil d’aigle assez péremptoire — pour oser contempler le ciel de son front, — sans être aveuglé par sa majesté ?
— Quelle extase, quelle furie t’inspire ? — Ma bien-aimée, maîtresse de la tienne, est une gracieuse lune ; — et ta Rosaline n’est près d’elle qu’un astre satellite, à peine visible.
— Alors mes yeux ne sont pas des yeux ! Je ne suis pas Biron ! — Oh ! sans ma bien-aimée, le jour se changerait en nuit ! — Les nuances souveraines des plus beaux teints — font étalage sur son splendide visage — où cent at-