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MESURE POUR MESURE.

que l’âge, la maladie, le dénûment et la prison — puissent infliger à la créature, est un paradis, — comparée à ce que nous craignons de la mort.

isabelle.

— Hélas ! hélas !

claudio.

Chère sœur, faites-moi vivre ! — Le péché que vous commettez pour sauver la vie d’un frère, — est autorisé par la nature au point — de devenir vertu.

isabelle.

Ô brute ! — Ô lâche sans foi ! ô malheureux sans honneur ! — Veux-tu donc te faire une existence de ma faute ? — N’est-ce pas une sorte d’inceste que de vivre — du déshonneur de ta propre sœur ? Que dois-je penser ? — Dieu me pardonne ! Ma mère aurait-elle triché mon père ? — Une engeance aussi dégradée et aussi perverse — ne saurait être issue de son sang. Reçois mon refus ! — Meurs, péris ! Quand je n’aurais qu’à me baisser — pour te soustraire à ton sort, je le laisserais s’accomplir. — Je dirai mille prières pour ta mort, — mais pas un mot pour te sauver !

claudio.

— Mais écoutez-moi, Isabelle !

isabelle.

Oh ! fi, fi, fi ! — Le vice chez toi n’est pas un accident, c’est un trafic ! — Tu ferais de la clémence même une entremetteuse ! — Il vaut mieux que tu meures promptement.

Elle va pour se retirer (7).
claudio.

Oh ! écoutez-moi, Isabelle. —


Rentre le duc.
le duc.

Un mot, de grâce, jeune sœur, un mot seulement.