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SCÈNE X.

cour, et là, la farceuse trône, — raillant l’autorité de ce roi, ricanant de sa pompe, — lui accordant un souffle, une petite scène — pour jouer au monarque, se faire craindre et tuer d’un regard, — lui inspirant l’égoïsme et la vanité avec l’idée — que cette chair qui sert de rempart à notre vie — est un impénétrable airain ! Puis, après s’être ainsi amusée, — elle en finit ; avec une petite épingle, — elle perce ce rempart, et… adieu le roi ! — Couvrez vos têtes, et n’offrez pas à ce qui n’est que chair et que sang — l’hommage d’une vénération dérisoire ; jetez de côté le respect, — la tradition, l’étiquette, et la déférence cérémonieuse ; — car vous vous êtes mépris sur moi jusqu’ici. — Comme vous, je vis de pain, je sens le besoin, j’éprouve la douleur, — et j’ai besoin d’amis. Ainsi asservi, — comment pouvez-vous me dire que je suis roi ?

l’évèque de carlisle.

— Milord, les hommes sages ne s’affligent jamais des maux présents, — mais ils emploient le présent à prévenir les afflictions nouvelles. — La peur paralysant la force, craindre l’ennemi, — c’est fortifier l’ennemi de toute votre faiblesse, — c’est follement combattre contre vous-même (15). — Trembler, c’est vous faire tuer. Que risquez-vous de plus à combattre ? — Mourir en combattant, c’est riposter à la mort par la mort, — tandis que mourir en tremblant, c’est payer à la mort un lâche tribut.

aumerle.

— Mon père a des troupes : informez-vous de lui, — et d’un membre apprenez à faire un corps.

richard.

— Tu me reprends justement… Arrogant Bolingbroke, je viens — échanger les coups avec toi dans une journée décisive. — Cet accès de frayeur est dissipé…