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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 15.djvu/118

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SONNETS.

Ainsi, je t’aurai possédé, comme dans l’illusion d’un rêve : roi, dans le sommeil, mais, au réveil, plus rien !

CIX

Si tu survis à mon existence résignée, alors que la mort brutale couvrira mes os de poussière, et si par hasard tu relis une fois encore ces pauvres méchants vers de ton ami disparu,

Compare-les aux meilleures œuvres du jour, et, fussent-ils au-dessous de toutes, garde-les par égard pour moi, sinon pour leur poésie, dépassée par l’essor de plus heureux génies.

Oh ! daigne alors en ma faveur faire seulement cette réflexion charitable : « Si la muse de mon ami avait grandi en même temps que ce siècle, son amour lui aurait donné un enfant plus beau, digne de marcher dans les rangs d’un meilleur équipage ;

« Mais, puisqu’il est mort et que les poëtes font mieux que lui, je veux les lire, eux, pour leur style, et lui, pour son amour ! »


*

CX

Pauvre âme, centre de ma terre pécheresse, jouet des puissances rebelles qui t’enveloppent, pourquoi pâtis-tu intérieurement et te laisses-tu dépérir, en peignant tes murs extérieurs de si coûteuses couleurs ?