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LES DEUX GENTILSHOMMES DE VÉRONE.

julia.

— Il paraît que vous ce l’aimiez pas, puisque vous vous défaites de ce gage : — elle est morte, sans doute ?

protée.

Non pas, je crois qu’elle vit.

julia.

— Hélas !

protée.

Pourquoi cries-tu : hélas ?

julia.

— Je ne puis m’empêcher de la plaindre.

protée.

Pourquoi la plains-tu ?

julia.

— Parce qu’elle vous aimait, je crois, autant — que vous aimez voire madame Silvia. — Elle songe à celui qui a oublié son amour, — et vous raffolez de celle qui ne se soucie pas du vôtre. — C’est dommage de voir tant d’amour contrarié ; — et y penser me fait crier : hélas !

protée.

— Allons ! donne-lui cet anneau, et en même temps — cette lettre.

Il lui montre la fenêtre de Silvia.

Voilà sa chambre. Dis à madame — que je réclame son divin portrait promis par elle. — Ton message terminé, reviens vite à ma chambre — où tu me retrouveras, triste et solitaire.

Protée sort.
julia.

— Combien de femmes se chargeraient d’un pareil message ? — Hélas, pauvre Protée ! tu as pris — un renard pour berger de tes brebis, — Hélas, pauvre folle !