Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/150

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

monies près, un tel misérable, — dont les jours sont voués au travail et les nuits au sommeil, — a l’avantage sur le roi. — L’esclave, membre d’une société paisible, — en a la jouissance ; mais il ne sait guère, dans sa grossière cervelle, — que de veilles il en coûte au roi pour maintenir cette paix — dont le paysan met à profit les heures !


Entre Erpingham.


erpingham.

— Milord, vos nobles, inquiets de votre absence, — vous cherchent par tout le camp.

le roi henry.

Bon vieux chevalier, — réunis-les tous dans ma tente ; — j’y serai avant toi.

erpingham.

J’obéis, milord.

Il sort.


le roi henry.

— Ô Dieu des batailles ! — retrempe les cœurs de mes soldats ! — Défends-les de la crainte ; ôte-leur — la faculté de compter, si le nombre de nos adversaires — doit leur enlever le courage !… Pas aujourd’hui, mon Dieu ! — Oh ! ne songe pas aujourd’hui à la faute — que mon père a commise en saisissant la couronne ! — J’ai fait inhumer de nouveau le corps de Richard, — et j’ai versé sur lui plus de larmes contrites — que la violence ne lui a tiré de gouttes de sang. — J’entretiens annuellement cinq cents pauvres — qui deux fois par jour élèvent leurs mains flétries — vers le ciel pour le pardon du sang ; et j’ai bâti — deux monastères où des prêtres graves et solennels — chantent incessamment pour l’âme de Richard (29). Je veux faire davantage ; — mais tout ce que je puis faire est bien peu de chose, — puisque ma pénitence doit venir après tout — implorer ce pardon !