Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/107

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avait été tué par toi, si tu étais éperdu, d’amour. comme moi, et si tu étais : banni comme moi, alors tu pourrais parler, alors tu pourrais arracher tes cheveux, et tomber à terre, comme je le fais en ce moment, pour y prendre la mesure d’une fosse non encore, creusée. (On frappe a là porte.)

LE FRÈRE LAURENT. — Leve-toi, on frappe ; mon bon Roméo, cache-toi.

ROMÉO. — Moi, non, à moins que la vapeur des sanglots de mon cœur malade, m’enveloppant comme un nuage, ne me dérobe à la recherche des yeux. (On frappe de nouveau.)

LE FRÈRE LAURENT. — Écoute comme on frappe !-Qui est là ? — Lève-toi, Roméo ; tu vas te faire prendre. — Attendez un instant ! — Relève-toi (on frappe encore) ; cours à mon cabinet d’étude. — Tout à l’heure. — Volonté de Dieu ! quel entêtement est-ce là ! — J’y vais, j’y vais ! (On frappe encore.) Qui donc frappe si fort ? d’où venez-vous ? que voulez-vous ?

LA NOURRICE, du dehors. — Laissez-moi entrer, et vous connaîtrez l’objet de mon message ; je viens de la part de Madame Juliette.

LE FRÈRE LAURENT. — En ce cas, soyez la bienvenue.

Entre LA NOURRICE.

LA NOURRICE. — révérend frère, oh ! dites moi, révérend frère, où est le Seigneur de Madame, où est Roméo ?

LE FRÈRE LAURENT. — Ici à terre, ivrede ses propres larmes.

LA NOURRICE. — C’est juste le cas de ma maîtresse, juste son cas !

LE FRÈRE LAURENT. — Ô lamentable, sympathie ! douloureuse conformité de situation !

LA NOURRICE. — C’est justement comme ça qu’elle est couchée, sanglotant et pleurant, pleurant et sanglotant. Relevez-vous, relevez-vous ; relevez-vous, si vous êtes un homme : au nom de Juliette, par amour pour elle, relevez-vous, et tenez-vous droit ; pourquoi vous laisser tomber dans un si grand désespoir4?