Le ciel faire silence, les nuages rester immobiles,
Les vents impétueux sans voix, et le globe au-dessous d’eux
Rouler muet comme la mort, et tout à coup le redoutable tonnerre
Déchirant l’air ; ainsi, après la pause de Pyrrhus,
La vengeance réveillée l’excite de nouveau à l’œuvre,
Et jamais les marteaux des Cyclopes ne tombèrent
Sur l’armure de Mars, forgée pour un usage éternel,
Avec moins de remords que ne tomba alors sur Priam
L’épée sanglante de Pyrrhus.
A bas, à bas, Fortune, à bas catin ! Ah, vous Dieux,
Enlevez-lui son pouvoir dans votre grande assemblée ;
Brisez de sa roue tous les rayons et toutes les jantes,
Et faites-en rouler le moyeu du sommet de la colline du ciel
Jusque chez les démons !
POLONIUS. — C’est trop long.
HAMLET. — On l’enverra chez le barbier avec votre barbe. — Je t’en prie, continue : — il lui faut du plaisant [8] ou du grivois, sans quoi il s’endort : — continue ; — venons à Hécube.
PREMIER COMÉDIEN :
Mais qui, oh ! qui eût vu la reine encapuchonnée....
HAMLET. — La reine encapuchonnée ?
POLONIUS. — Cela est bon : reine encapuchonnée est bon.
PREMIER COMÉDIEN :
Courir pieds nus du haut en bas de la ville, menaçant les flammes
Du double fleuve de ses yeux ; un chiffon sur cette tête.
Que tout à l’heure ceignait le diadème ; au lieu de robe,
Autour de ses reins maigres, dévastés par sa fécondité,
Portant une couverture, saisie en hâte au milieu des alarmes ;
Qui eût vu cela, eût d’une langue trempée de venin,
Proclamé traîtresse la Fortune ;