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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/251

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Il n’est que gueules (a), horriblement armorié qu’il est

Du sang de pères, de mères, de filles, de fils,

Collé et séché par la chaleur des rues incendiées

Qui prêtent une lumière implacable et maudite

A leurs vils meurtres : rôti par la colère et le feu,

Et tout enduit ainsi de sang coagulé,

Avec des yeux pareils à des escarboucles, l’infernal Pyrrhus

Cherche le vieux monarque Priam.

Maintenant continuez.

POLONIUS. — Par Dieu, Monseigneur, c’est bien récité, avec un bon accent et une parfaite mesure.

PREMIER COMÉDIEN :

Bientôt il le trouve

Combattant à armes trop courtes avec les Grecs ; sa vieille épée

Rebelle à son bras, reste là où elle tombe,

Et désobéit à son maître : inégal adversaire,

Pyrrhus court à Priam ; il frappe à faux dans sa rage,

Mais au seul vent et au seul sifflement de sa cruelle épée

Le vieillard, affaibli tombe. Alors la citadelle insensible d’Ilion,

Semblant ressentir ce coup, affaisse sur sa base

Son sommet enflammé, et par un hideux craquement

Fait prisonnière l’oreille de Pyrrhus : car, voyez, son épée

Qui s’abaissait sur la tête blanche comme lait

Du respectable Priant, sembla s’arrêter dans l’air :

En sorte que Pyrrhus se tint immobile, comme un tyran en peinture,

Et, comme s’il eût été indifférent à sa volonté et à son action projetée, ne fit rien.

Mais ainsi que nous voyons souvent, au moment de quelque tempête,

(a) Couleur rouge en blason.