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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/303

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LAERTES. — Pensée et affliction, passion, enfer lui-même, elle revêt tout cela de grâce et de gentillesse.

OPHÉLIA, chantant :

Et ne reviendra-t-il pas ?
Et ne reviendra-t-il pas ?
Non, non, il est mort.
Vas toi-même à ton lit de mort,
Il ne reviendra jamais.
Sa barbe était blanche comme neige,
Et ses cheveux blonds comme chanvre ;
Il est parti, il est parti,
Et nous perdons en vain nos gémissements :
Dieu ait en pitié son âme !

Ainsi que toutes les’ âmes chrétiennes, j’en prie Dieu. Dieu soit avec vous. (Elle sort.)

LAERTES. — Voyez-vous cela, ô mon Dieu ?

LE ROI. — Laertes, je dois des explications à votre douleur, ou vous me faites injustice. Retirons-nous à part seulement, et faites choix de ceux de vos sages amis que vous voudrez ; ils entendront et jugeront entre vous et moi : s’ils nous découvrent impliqué dans ce malheur directement, ou indirectement, nous consentons à vous donner en compensation notre royaume, notre couronne, notre vie, et tout ce que nous appelons nôtre : mais si cela n’est pas, contentez-vous de nous prêter votre patience, et nous travaillerons de concert avec votre âme pour lui donner due satisfaction.

LAERTES. — Soit : son genre de mort, ses funérailles obscures, cette absence de trophée, de glaive, d’écusson sur ses restes, cette omission de tout noble rite et de toute démonstration officielle, tout cela me crie, à se faire entendre de la terre au ciel, que je dois demander compte de ce qui s’est passé.

LE ROI. — Et compte vous sera rendu ; puis que la hache de la justice tombe là où se trouvera l’offense. Je vous en prie, venez avec moi. (Ils sortent.)