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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1872, tome 9.djvu/307

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LE ROI. — C’est celle d’Hamlet : — « Nu » — et dans un post-scriptum, il dit « seul ! » Pouvez-vous m’aider à comprendre ?

LAERTES. — Je me perds dans cette énigme, Monseigneur. Mais qu’il vienne ; cela réchauffe mon cœur malade de songer que je vivrai pour lui dire à. ses dents : « Voilà ce que tu as fait ! »

LE ROI. — S’il en est ainsi, Laertes, — mais comment en serait-il ainsi ? et comment, d’autre part, en serait-il autrement ? — voulez-vous vous laisser guider par moi ?

LAERTES. — Oui, Monseigneur, pourvu que vous ne me guidiez pas de manière à m’imposer la paix.

LE ROI. — C’est ta propre paix, à toi, que je veux te donner. S’il est à cette heure revenu, ayant échappé à son voyage et sans intention de le recommencer, je saurai l’amener à un exploit, maintenant arrêté dans ma pensée, sous lequel il ne peut que succomber ; en sorte que sa mort ne soulèvera pas le plus petit murmure de blâme, et que sa mère elle-même absoudra le complot et l’appellera accident.

LAERTES. — Monseigneur, je me laisserai diriger par vous, surtout si vous pouvez arranger votre projet de telle sorte que j’en sois l’instrument.

LE ROI. — C’est justement ma pensée. Depuis votre voyage on vous a beaucoup vanté, et cela en présence d’Hamlet, pour un talent dans lequel vous brillez, diton : toute la somme de vos mérites réunis n’a pas excité chez lui autant d’envie que ce seul talent, et cependant il est à mon avis de l’ordre le moins élevé.

LAERTES. — Quel est ce talent, Monseigneur ?

LE ROI. — Oh, un simple ruban au chapeau de la jeunesse, mais qui lui est nécessaire cependant ; car la parure riante et négligée qu’elle porte convient aussi bien à la jeunesse, que conviennent à l’âge mûr ses robes et ses fourrures, insignes de santé et de gravité. Il y a deux mois, un gentilhomme de Normandie était ici ; — j’ai vu de mes yeux les Français et j’ai servi contre eux ; ils sont bons cavaliers : mais ce galant homme avait de la