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128 OEUVRES POÉTIQUES DE SIIELLEV

de couler silencieusement. Guettant les festons d’écume tissés par la marée affaiblie sur le sable pailleté, elle gémissait profondément, et à chaque gémissement portait son regard sur la mer.

XVIII

Et, quand elle vit le Serpent blessé plonger dans les vagues, ses lèvres pâlirent, s'entr'ouvrirent et tremblèrent ; les larmes cessèrent de couler de ses yeux imperturbables ; aucun accent de plainte ; m ; lui échappa plus ; mais elle se leva et, laissant flotter au gré de la brise sa brillante robe d’étoiles et sa chevelure ombreuse, elle fit entendre sa voix ; les cavernes de la vallée qui s’ouvraient sur l'océan la reçurent, et elle remplit de ses sons d’argent les profondeurs de l’air.

XIX

Elle parlait dans un langage dont l'étrange mélodie n’appartient pas à la terre. J'entendais seul — et cette solitude rendait sa musicque plus mélodieuse encore — la pitié et l’amour de chacune de ses modulations ; mais ces doux accents étaient connus du Serpent, leur langue native à tous deux ; il ne battait plus languissamment l'embrun blanchissant, mais, s'enroulant à travers les vertes ombres des vagues qui battent le rivage, il vint s'arrêter à ses pieds de neige.

XX

Alors la femme s’assit de nouveau sur le sable, elle pleura et serra convulsivement ses mains, tout en reprenant l'inintelligible accent de sa voix mélodieuse et son air éloquent ; et elle découvrit son sein . et les ombres vertes et lumineuses de la mer jouèrent dans