Page:Sienkiewicz - Quo vadis, 1983.djvu/77

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— Rentrons. Il ne faut espérer d’assistance que d’où elle peut venir.

Elles se rendirent dans l’atrium, qu’elles ne quittèrent plus jusqu’au soir. Lorsqu’il fit sombre et que les esclaves apportèrent des lampadaires à quatre branches et à haute flamme, toutes deux apparurent très pâles. La conversation s’interrompait à tout moment et elles prêtaient l’oreille au moindre bruit. Lygie ne cessait de répéter que, pour si pénible qu’il lui fût de se séparer d’Acté, elle préférait cependant voir tout se terminer ce soir-là ; car, certainement, Ursus l’attendait déjà dans l’obscurité. Néanmoins, l’émotion rendait son souffle précipité et haletant. Acté rassemblait fiévreusement tous les bijoux qu’elle pouvait trouver, et les nouant dans un pan du peplum de Lygie, l’adjurait de ne pas refuser ce don qui lui serait utile dans sa fuite. Par instants planait un morne silence, mais il leur semblait entendre murmurer derrière le rideau, ou les pleurs lointains d’un enfant, ou l’aboiement des chiens.

Soudain, la portière de l’antichambre s’écarta sans bruit, et dans l’atrium apparut, tel un spectre, un homme de haute taille, au visage bronzé et grêlé. Lygie l’avait vu chez Pomponia et le reconnut aussitôt : c’était Atacin, un affranchi de Vinicius. Acté poussa un cri ; mais Atacin s’inclina très bas et dit :

— Salut à la divine Lygie, de la part de Marcus Vinicius qui l’attend pour le festin, dans sa maison ornée de verdure.

Les lèvres de la jeune fille blêmirent davantage encore :

— J’y vais, dit-elle.

Et Lygie, pour faire ses adieux à Acté, lui noua ses deux bras autour du cou.


Chapitre X.

La maison de Vinicius était, en effet, ornée de myrte et de lierre, dont les festons agrémentaient les murs et les portes ; autour des colonnes serpentaient des guirlandes de vigne.

Dans l’atrium, dont l’ouverture était protégée contre la fraîcheur de la nuit par un rideau de pourpre, il faisait clair comme en plein jour. Dans des lampadaires à huit et à douze branches, affectant la forme de vases, d’arbres, d’animaux, d’oiseaux, ou de statues portant des lampes, brûlait de l’huile parfumée. Sculptés en albâtre, en marbre, ou coulés en bronze doré de Corinthe, tout en étant moins beaux que les fameux lampadaires du temple d’Apollon dont se servait Néron, ils n’en étaient pas