Page:Sieyès-Qu'est ce que le tiers état-1888.djvu/109

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d’un nouveau pouvoir spécial, ainsi qu’elle a été expliquée ci-dessus, pour règle, avant tout, la grande affaire de la constitution, paraît le vrai moyen de mettre fin à la dissension actuelle et aux troubles possibles de la nation. N’y eût-il rien à craindre de ces troubles, ce serait encore une mesure nécessaire à prendre, parce que, tranquilles ou non, nous ne pouvons pas nous passer de connaître nos droits politiques, et de nous en mettre en possession. Cette nécessité nous paraîtra plus pressante encore, si nous songeons que les droits politiques sont la seule garantie des droits civils et de la liberté individuelle. Je terminerais ici mon mémoire sur le tiers état, si je n’avais entrepris que d’offrir des moyens de conduite… mais je me suis proposé encore de développer des principes. Qu’il me soit donc permis de suivre les intérêts du tiers jusque dans la discussion publique qui va s’élever sur la véritable composition d’une assemblée nationale. Ce n’est point des affaires ni du pouvoir que je vais parler, mais des lois qui doivent déterminer la composition personnelle du corps des députés. Il faut, d’abord, comprendre clairement quel est l’objet ou le but de l’assemblée représentative d’une nation ; il ne peut pas être différent de celui que se proposerait la nation elle-même, si elle pouvait se réunir et conférer dans le même lieu. Qu’est-ce que la volonté d’une nation ? C’est le résultat des volontés individuelles, comme la nation est l’assemblage des individus. Il est impossible de concevoir une association légitime qui n’ait pas pour objet la sécurité commune, la liberté commune, enfin la chose publique.

Sans doute, chaque particulier se propose, en outre, des fins particulières. Il se dit : à l’abri de la sécurité commune, je pourrai me livrer tranquillement à mes projets personnels, je suivrai ma félicité comme je l’entendrai, assuré de ne rencontrer de bornes légales que celles que la société me prescrira pour l’intérêt commun auquel j’ai part, et avec lequel mon intérêt particulier a fait une alliance si utile.

Mais, conçoit-on qu’il puisse y avoir dans l’assemblée générale des membres assez insensés pour oser tenir ce langage : « vous