Page:Sieyès-Qu'est ce que le tiers état-1888.djvu/75

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provinciales.

Il était impossible de s’occuper, un moment, de l’intérêt de la nation sans être frappé de la nullité politique du tiers. Le ministre a senti même que la distinction des ordres était contraire à toute espérance de bien, et il a projeté sans doute de la faire disparaître avec le temps. C’est du moins dans cet esprit que le premier plan des assemblées provinciales paraît avoir été conçu et rédigé. Il ne faut que le lire avec un peu d’attention pour s’apercevoir qu’on n’y avait pas égard à l’ordre personnel des citoyens. Il n’y était question que de leurs propriétés, ou de l’ordre réel. C’était comme propriétaire et non comme prêtre, noble ou roturier, qu’on devait être appelé dans ces assemblées, intéressantes par leur objet, bien plus importantes encore par la manière dont elles devaient se former, puisque par elles s’établissait une véritable représentation nationale.

Quatre espèces de propriétés étaient distinguées : 1º les seigneuries. Ceux qui les possèdent, nobles ou roturiers, ecclésiastiques ou laïques, devaient former la première classe. On divisait en trois autres classes les propriétés ordinaires ou simples, par opposition aux seigneuries. Une distribution plus naturelle n’en aurait formé que deux, indiquées par la nature des travaux et la balance des intérêts ; savoir, les propriétés de la campagne et celles des villes. Dans ces dernières, on aurait compris, avec les maisons, tous les arts, fabriques, métiers, etc. Mais on croyait sans doute que le temps n’était pas encore venu de fondre dans ces deux divisions les biens ordinaires ecclésiastiques. Ainsi on avait cru devoir laisser les biens simples du clergé dans une classe séparée. C’était la seconde. La troisième comprenait les biens de la campagne, et la quatrième les propriétés des villes. Remarquez que, trois de ces sortes de propriétés étant indistinctement possédées par des citoyens des trois ordres, trois classes sur quatre auraient pu être composées indifféremment de nobles, de roturiers ou de prêtres. La deuxième classe elle-même aurait contenu des chevaliers de Malte, et même des laïques pour représenter les hôpitaux, les fabriques paroissiales, etc.