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APPORT DE DELACROIX

savant aurait-il éclairé plus complètement le peintre.

Théophile Silvestre raconte qu’en plein âge mûr Delacroix disait encore : « Je vois chaque jour que je ne sais pas mon métier. » Il pressentait donc des procédés

plus féconds que ceux qu’il avait employés. — S’il avait connu toutes les ressources du mélange optique, il aurait généralisé le procédé de hachures de couleurs pures juxtaposées, dont il avait usé dans certaines parties de ses œuvres ; il n’aurait peint qu’avec des couleurs se rapprochant le plus possible de celles du spectre solaire. — La lumière colorée, qu’il avait obtenue dans les chairs de ses peintures décoratives en les zébrant de vert et de rose décidés, selon l’expression de Ch. Blanc, se serait alors répandue sur toutes ses œuvres.

Une phrase attribuée à Delacroix formule bien ses efforts : « Donnez-moi la boue des rues, déclarait-il, et j’en ferai de la chair de femme d’une teinte délicieuse », voulant dire que, par le contraste d’autres couleurs intenses, il modifierait cette boue et la colorerait à son gré.

C’est bien là, en effet, le résumé de sa technique ; il s’efforce de rehausser des préparations ternes par le jeu d’éléments purs ; il s’évertue à faire de la lumière avec des couleurs boueuses. Plutôt que d’embellir cette boue, que ne l’a-t-il répudiée !

Mais voici venir d’autres peintres qui feront une nouvelle étape vers la lumière en ne peignant plus qu’avec les couleurs de l’arc-en-ciel.