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APPORT DES NÉO-IMPRESSIONNISTES

nies de la nature, tels qu’ils se présentent, sans nul souci d’ordonnance ou de combinaison. « L’impressionniste s’assied au bord d’une rivière », comme le dit leur critique Théodore Duret, et peint ce qu’il a devant lui. Et ils ont prouvé que, dans cette manière, on pouvait faire merveille.

Le néo-impressionniste, suivant en cela les conseils de Delacroix, ne commencera pas une toile sans en avoir arrêté l’arrangement. Guidé par la tradition et par la science, il harmonisera la composition à sa conception, c’est-à-dire qu’il adaptera les lignes (directions et angles), le clair-obscur (tons), les couleurs (teintes) au caractère qu’il voudra faire prévaloir. La dominante des lignes sera horizontale pour le calme, ascendante pour la joie, et descendante pour la tristesse, avec toutes les lignes intermédiaires pour figurer toutes les autres sensations en leur variété infinie. Un jeu polychrome, non moins expressif et divers, se conjugue à ce jeu linéaire : aux lignes ascendantes, correspondront des teintes chaudes et des tons clairs ; avec les lignes descendantes, prédomineront des teintes froides et des tons foncés ; un équilibre plus ou moins parfait des teintes chaudes et froides, des tons pâles et intenses, ajoutera au calme des lignes horizontales. Soumettant ainsi la couleur et la ligne à l’émotion qu’il a ressentie et qu’il veut traduire, le peintre fera œuvre de poète, de créateur.