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LA TOUCHE DIVISÉE

lumières colorées, grâce au mélange optique de pigments juxtaposés. Hachures, virgules, touches divisées sont trois moyens conventionnels identiques, mais accommodés aux exigences particulières des trois esthétiques correspondantes : ainsi les techniques s’enchaînent parallèlement aux esthétiques et doublent le lien qui unit si étroitement le maître romantique, les impressionnistes et les néo-impressionnistes.

Delacroix, esprit exalté et réfléchi tout ensemble, couvre sa toile de hachures fougueuses, mais qui dissocient la couleur avec méthode et précision : et, par cette facture propice au mélange optique et au modelé rapide dans le sens de la forme, il satisfait son double souci de couleur et de mouvement.

Supprimant de leur palette toutes les couleurs ternes ou sombres, les impressionnistes durent reconstituer, avec le petit nombre de celles qui leur restaient, un clavier étendu. Ils furent ainsi conduits à une facture plus fragmentée que celle de Delacroix : et, au lieu de ses hachures romantiques, ce furent de minimes touches posées du bout d’un pinceau alerte et s’enchevêtrant en pelote multicolore, — pimpantes façons bien adaptées à une esthétique toute de sensation soudaine et fugitive.

Jongkind, avant eux, et aussi Fantin-Latour avaient usé d’une facture analogue, mais sans pousser aussi loin ce morcellement de la touche. Vers les années 80,