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Contes grassouillets.

appellent : le bon temps ! Donc le sire de Humevesse, claquemuré dans son imprenable bastille, maltraitait ses serviteurs au dedans et bravait, au dehors, son légitime seigneur, ce qui, de vous à moi, est le fait d’un assez vilain coco de gentilhomme. Et cependant, comme une branche de giroflée que le printemps fleurit aux fentes d’une haute muraille, Dieu avait mis au cœur de cet homme de fer une affection douce, une irrémissible tendresse. Sa fille Bertrade méritait vraiment cet amour et en méritait beaucoup d’autres encore. Car c’était une superbe personne dont la chevelure semblait faite d’un rayon de miel et les yeux de deux lapis mouchetés d’or fin. Les charmes de son corps égalaient ceux de son visage, et ses formes, parfaites dans leur voluptueux arrondissement, étaient de nature à satisfaire l’homme de bien le plus difficile en matière de beauté. Avenante avec cela, aussi clémente aux pauvres gens que son père leur était impitoyable, adorée de tous autour d’elle et principalement du jeune Alcindor, un chevalier accompli qui n’avait contre lui que le nom