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Contes grassouillets.

sur eux, Pierre ayant abaissé ses yeux qu’il avait tenus fixés jusque-là sur ceux de sa bonne amie, laquelle se développait en pleine lumière dans la majestueuse harmonie de ses formes, fit une épouvantable grimace et devint tout à coup silencieux. On lui avait tenu, le soir même, de méchants propos sur la Suzanne et Pierre était aussi jaloux que respectueux. Or, la rotondité du ventre de sa belle, rotondité vraiment désordonnée et anormale, venait de le frapper. Le fait était que la future mère de deux jumeaux ne se comporte pas autrement en public. Pierre était un caractère en dedans. Il ne fit aucune scène, mais, ne doutant pas un seul instant que Suzanne se fût fait engrosser par quelque rival moins délicat que lui-même, quand il fut arrivé à la porte de la famille Obin :

V’là vot’ fill’ que j’vous ramène !
Elle est dans un triste état !
............

— Assez, docteur, dit Laripète qui connaissait encore cette sérénade.

— Chanta-t-il d’une voix comique et stri-