Page:Silvestre de Sacy - Calila et Dimna, ou Fables de Bidpai, 1816.djvu/24

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il est vrai, l’attribuoient à Abd-allah ben-Almokaffa, comme nous l’apprend Ebn-Khilcan ; mais cette opinion isolée est contredite par le témoignage unanime d’une multitude d’écrivains Arabes et Persans, qui reconnoissent tous que cet Abd-allah ben-Almokaffa n’a fait que traduire ce livre du pehlvi ou de l’ancienne langue des Perses, en arabe, et qu’il avoit été apporté de l’Inde et traduit en pehlvi, sous le règne du grand Chosroës ou Khosrou Nouschiréwan, par un médecin Persan nommé Barzoui ou Barzouyèh. Masoudi, historien Arabe de la première moitié du ive siècle de l’hégire, attribue le livre de Calila à un roi de l’Inde ; et la préface qui se lisoit à la tête de la traduction Pehlvie, et que le traducteur Arabe nous a conservée, ne laisse aucun doute sur l’origine Indienne de ce livre. Ferdousi a consigné cette même tradition dans le Schah-namèh ; et s’il est un fait que la critique la plus rigoureuse ne puisse contester, ce serait assurément celui-là, quand même on n’auroit à faire valoir en sa faveur que cette imposante réunion de témoignages.

Mais nous pouvons aujourd’hui remonter encore plus près de la source de ces traditions historiques, depuis que les savans travaux des Anglais nous ont ouvert la carrière de la littérature Samscrite, et que nous possédons, tant en original que dans une traduction Angloise, les Fables de Vischnou-Sarma, ou le recueil d’apologues intitulé Hitoupadésa.

Ce n’est point que je veuille dire que nous ayons dans ce livre Indien, l’original du livre de Calila. La différence qui est entre ces deux ouvrages est trop grande, pour que le dernier puisse être considéré comme une traduction ou une copie du premier ; mais aussi ils offrent trop de traits de ressemblance, pour qu’il soit permis de douter que, du moins, ils ont une source commune. La conséquence que je tire de ces ressemblances paroîtra encore plus forte, et l’objection fondée sur des différences que je suis loin de contester, sera considérablement atténuée, si l’on prend la peine de faire attention aux observations suivantes.

1° Si l’on admet les traditions relatives à la mission de Barzouyèh dans l’Inde, et je ne vois pas pourquoi on se refuserait à