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régime dont le nouveau souverain voulait détruire jusqu’au souvenir, Il en resta cependant des débris considérables que Se-ma Ts’ien put réunir dans son oeuvre ; certains indices nous montrent en effet qu’il copie souvent des histoires locales : ainsi, lorsqu’il raconte les événements qui intéressèrent les pays de Wei (ch. XLIV) ou de Yen (ch. XXXIV), il dit : « notre armée », « nos places fortes », « notre capitale » : bien plus, en parlant d’un prince de Yen qui monta sur le trône en 253 avant J.-C. il dit : « le roi actuel ». Ces textes ne sauraient être de la main de Se-ma Ts’ien. Enfin il est au moins une de ces chroniques féodales qui nous est parvenue dans son intégrité, c’est celle des princes de Ts’in, car Che-hoang-ti eut soin d’excepter de la proscription l’histoire de son propre royaume ; Se-ma Ts’ien ne manque pas de la reproduire et fait remarquer quelle en est l’importance CLIII-1.

De ce qui précède on peut dégager quelques considérations générales sur la valeur des sources des Mémoires historiques pour la période considérable pendant laquelle régna la dynastie Tcheou.

Nous y distinguons dès l’abord deux classes fort différentes ; les uns sont des recueils de discours : tel est en très grande partie le Chou king, tels sont le Kouo yu et le Tchan kouo ts’é. Les autres sont des chroniques locales comme le Tch’oen ts’ieou amplifié par ses trois commentaires et les annales de chacun des royaumes féodaux.

De ces deux catégories, celle des discours a l’origine la plus ancienne. C’est un fait remarquable qui ne se


CLIII-1. Mémoires historiques, chap. XV, p. 1 v° : « Quand Ts’in eut atteint son but, il brûla dans tout l’empire le Che king et le Chou king et surtout les mémoires historiques des seigneurs, car il pensait qu’il y avait là (des armes pour) la critique et le blâme. Si le Che king et le Chou king reparurent, c’est qu’un grand nombre d’exemplaires en étaient cachés chez les particuliers ; mais les mémoires historiques ne se trouvaient conservés que dans la maison des Tcheou et c’est pourquoi ils furent détruits. C’est regrettable : c’est regrettable ! Il n’y a plus que les mémoires (du pays) de Ts’in : encore ne mentionnent-ils pas les jours et les mois et leur rédaction est-elle brève et incomplète. »