Page:Sima qian chavannes memoires historiques v1.djvu/197

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qu’ils ont suivie après lui. Bien plus, il est devenu la principale autorité pour toute l’histoire de Chine antérieure au Ier siècle avant notre ère et il a éclipsé la plupart des écrivains qui le précédèrent ; en effet, il a su choisir excellemment entre les textes qui constituaient la littérature de son temps ; il a distingué ceux qui étaient dignes de foi de ceux qui étaient peu croyables ; il a résumé dans son oeuvre la quintessence des traditions authentiques. C’est donc le jugement critique dont il a fait preuve qui, non moins que sa méthode, lui a conféré la grande autorité dont il jouit.

La critique de Se-ma Ts’ien ne s’exerce presque jamais d’une manière apparente. Il ne discute pas la valeur des écrits dont il se sert ; entre la certitude et l’erreur il semble ignorer la probabilité qui est cependant la seule vérité approximative à laquelle souvent l’histoire puisse prétendre ; il cite les témoignages qu’il croit bons ; il passe sous silence ceux qu’il condamne. On conçoit qu’il soit dès lors malaisé de montrer avec quel degré de précision il sépare le vrai du faux, puisque le faux étant omis par lui, on ne peut savoir s’il l’a connu et rejeté ou s’il l’a simplement ignoré. Dans quelques cas néanmoins on voit à l’oeuvre sa faculté de discerner.

Les auteurs taoïstes tels que Tchoang-tse contiennent une foule de légendes sur la haute antiquité ; il est bien peu probable que Se-ma Ts’ien ne les ait pas lues et, s’il n’en parle pas, c’est donc qu’il les tenait pour suspectes. Entre tous les personnages transfigurés par la fable, Hoang-ti paraît avoir été le plus en faveur dans le taoïsme du IIe siècle avant notre ère ; il est le dieu de la doctrine dont Lao-tse est le prophète. Dans le Traité sur les sacrifices fong et chan, Se-ma Ts’ien rapporte incidemment quelques-uns des racontars qui se débitaient de son temps au sujet de cet auguste ancêtre de tous les Fils du ciel ; il nous a conservé en particulier les discours que Kong-suen K’ing tenait à l’empereur Ou : « Hoang-ti prit du cuivre du mont Cheou et fondit un trépied au bas du mont King. Lorsque le trépied fut achevé, un dragon