Page:Sima qian chavannes memoires historiques v1.djvu/37

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mais l’obscurité même qui les voilait pouvait faire croire qu’elles étaient d’augustes mystères ; on voulut y voir le symbole sacré de l’acte par lequel les dieux d’en haut et ceux d’en bas reconnaissaient la légitimité de la monarchie régnante. On les fît donc revivre en les entourant d’un rituel compliqué ; quand les savants les plus renommés de la cour eurent réglé point par point tous les détails de la cérémonie, l’empereur se mit en route pour aller la célébrer sur la grande montagne sainte de l’Orient, le T’ai-chan.

Se-ma T’an, en sa qualité d’astrologue officiel, était nécessairement du cortège ; mais les fatigues du voyage déterminèrent chez lui une maladie et il dut s’arrêter à Lo-yang, à peu près à mi-chemin entre la capitale et le T’ai-chan. Il reconnut bientôt que ses forces étaient à bout et fit appeler auprès de lui son fils, Se-ma Ts’ien, pour lui adresser ses dernières recommandations. Il était pénétré, d’une grande tristesse : les fonctions qu’il avait exercées jusqu’alors, il se voyait incapable de les remplir au moment où l’imposante cérémonie qui se préparait leur aurait donné un lustre nouveau ; l’histoire qu’il avait entreprise, il la laissait inachevée ; la seule consolation qui lui restât était d’espérer que son fils lui succéderait dans sa charge et terminerait son œuvre. Il le pria donc en termes émus d’être son digne continuateur. Il lui rappela que c’était une noble tradition dans la famille Se-ma d’être grand astrologue de père en fils et que ce titre allait être plus glorieux que jamais. Quant à l’histoire, les temps paraissaient être aussi providentiellement marqués pour l’écrire : par une sorte de loi surnaturelle, tous les quatre ou cinq cents ans une époque était fortunée entre toutes ; un sage y apparaissait dont les écrits se transmettaient, objet d’immortelle admiration, à la postérité : les poésies où le duc de Tcheou louait ses ancêtres volaient vivantes sur les bouches de tous ; longtemps après le duc de Tcheou, vécut Confucius dont l’enseignement était resté impérissable ; plus de quatre siècles s’étaient écoulés depuis la mort de ce grand penseur ; on avait pris, il y avait quelques années