Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/144

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vous ne savez respecter ni les liens du sang, ni la foi jurée ; partout et toujours vous serez farouche et criminel[1]. »

O sainte fraternité, que vas-tu devenir ? Où iras-tu établir ton asile inviolable ? En présence de cette prodigieuse diversité d’opinions et de croyances, qui est le résultat si naturel des dispositions variées de nos cœurs et de nos esprits, pourquoi veut-on poser l’uniformité des convictions religieuses comme condition à ton règne parmi les hommes ? Trouveras-tu, je ne dis pas une nation, mais une famille seulement où tu pourras implanter un rameau d’olivier ? Vois où en sont arrivés ceux qui ont voulu faire tout dépendre de la profession d’un article de foi ! Jésus, cet homme au caractère si doux et si indulgent, n’a-t-il pas été poussé, comme malgré lui, à déclarer la guerre à ceux qui ne croyaient pas en sa divinité ? N’a-t-il pas dit de sa propre bouche que le credo sur lequel il allait fonder son édifice, deviendrait un brandon de désordre pour les maisons et les familles jusqu’alors les plus unies ? « Ceux qui ne sont pas pour moi sont contre » moi… Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix » sur la terre ; je suis venu apporter non la paix, mais l’épée, car je suis venu mettre la division entre le fils et le père, entre la fille et la mère, entre la belle-fille et la belle-mère. Et on aura pour ennemis ses propres domestiques[2]. »

Ces paroles si dures, combien il a dû en coûter au fils de Marie de les prononcer. Mais telle est l’inflexibilité de la logique, qu’elle arrache souvent des accents dont on est soi-même épouvanté. C’est pour être parti du faux principe consistant à faire de la foi en sa divinité la pierre de touche

  1. Coran, ch. XXIV, v. 45, ch. LIII, v. 30, ch. 59, v. 21 et 22.
  2. Voir Math., ch. 10, v. 34, 35 et 36. Luc, ch. 12, v. 51.