Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/169

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nes religieuses qui ont essayé, avant et après lui, de mener les hommes vers Dieu. Toutes ont invariablement abouti à faire du renoncement, du détachement de ce monde, le moyen suprême de s’attacher au Créateur, de se rapprocher de lui, de s’unir à lui par les liens de l’amour. Recommander cela, c’était évidemment enrayer la marche l’Humanité qui, en définitive, est appelée à vivre constamment dans l’espace et le temps, et n’a pas d’autre immortalité à attendre que celle qu’elle sait se donner par des institutions sagement policées.

Seul le Judaïsme a entrevu que si l’homme et l’Humanité ont la même destinée, ils n’ont pas la même destination : Se perpétuer sur la terre est le fait de celle-ci, tandis que le premier, l’homme, ira un jour continuer ailleurs sa vie d’ici-bas ; mais, aussi longtemps qu’il se trouve dans ce monde, il ne peut pas, en raison de sa qualité de membre de l’Humanité, se refuser à travailler à cette prospérité sociale qui sera l’héritage des générations appelées à l’y succéder ; il doit apporter sa pierre à l’édifice de la civilisation, sous le toit duquel viendront s’abriter tour à tour ceux qui naitront après lui, dans tous les siècles futurs. Cet édifice, nous venons de montrer de quelle manière il se construit, recevant pour base la recherche du bien-être moral et matériel de l’homme, s’étayant dans le cours de son élévation de tout ce que la pensée pourra découvrir de nouveau et d’utile dans le domaine de l’art, de la philosophie, de la science et de l’industrie, et, en dernier lieu, se couronnant de la vérité entière et pure du Dieu qui en formera comme le dôme majestueux. La terre pour point d’appui, Dieu pour terme final des aspirations et, entre les deux, pour arriver de l’une à l’autre, une existence exemple d’erreur, de vice, de péché, pleine de satisfactions et d’espérances, telle est, pour nous résumer, la destinée de l’homme et celle de l’Humanité.