Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/181

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perspective des joies et des délices qui les attendaient au séjour des Immortels. N’est-ce pas en vérité dans cet ordre d’idées qu’ont été prononcées ces mémorables paroles : « Vous serez bienheureux lorsque les hommes vous haïront, qu’ils vous retrancheront de leurs Synagogues, qu’ils vous diront des outrages et rejetteront votre nom comme mauvais à cause du Fils de l’homme. Réjouissez-vous en ce temps-là et tressaillez de joie, car voilà que votre récompense sera grande » dans le ciel[1]. »

Quelle était différente la situation dans laquelle se trouvait Moïse en sa qualité d’interprète de Dieu vis-à-vis du peuple hébreu ! Recevant pour les transmettre à Israël les volontés du Seigneur qui lui parlait, comme dit l’Écriture, de bouche à bouche, qu’avait-il besoin de chercher ailleurs que dans la déclaration de ces volontés mêmes une base à l’empire du devoir, ainsi qu’à celui du sentiment religieux ? « Voici ce que demande l’Éternel de vous, voici ce qu’il vous ordonne, parce que, si vous ne l’écoutez pas, tel châtiment vous sera infligé, comme, au contraire, vous recevrez telle récompense pour prix de votre obéissance ». N’était-ce pas là le ton sur lequel il avait à s’adresser aux enfants de Jacob ? Ne pouvait-il pas les menacer de tel ou tel fléau ou leur promettre telle et telle félicité, puisque de ses lèvres ne découlait jamais que l’expression des desseins de Dieu, et que les paroles même dont il se servait lui étaient inspirées d’en haut ? Ou plutôt, se serait-il hasardé à parler sur un ton aussi affirmatif et aussi net et décisif des bénédictions et des malédictions énumérées par lui[2] s’il n’avait pas été sûr d’être en cela le fidèle interprète de la pensée divine ? Il y a quelque chose de bien autrement éloquent, d’entendre Moïse

  1. Luc, ch. VI, v. 22 et 23.
  2. Lévitique, ch. XXVI et Deutéronome, ch. XXVIII.