Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/225

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même la rémunération ne peut qu’être spirituelle ; que pareillement à l’âme qui a reçu de Dieu son principe de conservation indéfinie, la rémunération soit en bien, soit en mal, peut être prolongée à la limite que Dieu voudra, mais qu’en même temps tout concourt à prouver que, si les récompenses peuvent être éternelles, il est de toute impossibilité que les peines le soient, dans le cas où on veuille laisser à Dieu son attribut de Dieu de bonté.

Eh bien ! c’est là précisément ce que le Judaïsme affirme, et nous sommes fiers de constater comment il a su concilier son ignorance des dispositions de la vie future, avec une pleine et entière connaissance de l’immatérialité des récompenses et des peines, et de la non éternité de ces dernières. Sur ces points, nous trouvons complète et pleine lumière dans la doctrine israélite. Et d’abord qu’il y ait des châtiments et des félicités dans la vie future, cela est déjà inscrit sur les premières pages du Pentateuque. D’une part, la soudaine disposition d’Enoch que Dieu prit avec lui au ciel[1] et d’autre part la punition dont fut menacé le crime du suicide[2], n’en sont-ils pas une manifeste attestation ? On a longuement et diversement commenté le texte relatif à Enoch.

Ce n’est pas ici le lieu de décider entre l’interprétation toute de bon sens qu’en a donnée notre célèbre exégète français, Raschi, et la paraphrase d’Onkelos, expression des croyances religieuses de l’époque où vivait le traducteur chaldéen[3].

  1. Genèse, chap. V, v. 24.
  2. Genèse, chap. IX, v. 4.
  3. Onkelos, traduit au livre de la Genèse, chap. V, v. 24 : « Et Enoch marcha dans la crainte de Dieu et il ne fut plus, car Dieu ne le fit point mourir ». Raschi traduit au même endroit : « Enoch était juste, mais comme il aurait pu se laisser entrainer au mal par le mauvais exemple qu’il avait tous les jours sous les yeux, Dieu préféra l’appeler à lui. »
      La Vulgate et les Septantes conservent le vague du texte. L’une traduit : « Et il ne parut plus, parce que Dieu l’avait enlevé ». Les Septantes : « Et on ne le trouva plus, parce que Dieu l’avait transporté. »