Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/273

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des peines et des récompenses. Qu’on veuille bien le remarquer. Nous ne prétendons pas que les deux nouvelles religions n’aient point parlé de la crainte de Dieu dans les mêmes termes que l’a fait le Judaïsme. Nulle part on ne les voit élever à cet égard affirmation contre affirmation. n’y avait aucune nouvelle opinion à formuler là-dessus. Mais, tandis que la religion juive ne veut pas d’une crainte synonyme d’épouvante et de terreur, les deux autres religions paraissent sinon la rechercher, du moins y amener. Et quand même la plupart de leurs docteurs se seraient prononcés dans un sens opposé, il n’en est pas moins certain que la prédication seule de la croyance à des peines éternelles, suffisait en tout temps à inspirer plutôt de la terreur qu’une crainte respectueuse pour Dieu. Pour qui lit avec quelque attention dans les évangiles l’apostrophe finale qui clôt presque chaque figure parabolique du royaume des cieux par les paroles suivantes : « Jetez le serviteur inutile dans les ténèbres du dehors ; c’est là qu’il y aura des pleurs et des grincements de dents[1] » ; pour qui se rappelle la sombre description des supplices matériels que le Coran place dans l’enfer[2], pour celui-là il ne saurait être douteux que ni l’Église, ni la Mosquée ne pouvaient prêcher une crainte de Dieu aussi pure, aussi dégagée de tout élément matériel, que l’est celle enseignée par la Synagogue. Ajoutez à cela les superstitions résultant inévitablement de la croyance au diable et à Eblis, tant favorisée par le Christianisme et le Mahométisme, et vous aurez une preuve de plus du peu de logique qu’il y aurait à faire découler une véritable crainte de Dieu des dogmes musulmans et chrétiens. Si pourtant, ce que nous sommes loin de nier, il s’est trouvé dans l’une et dans l’autre des deux nouvelles religions des

  1. Math., chap. XIV, v. 41. Luc, chap. XIV, v. 24 à v. 29.
  2. Voir dans notre chapitre de la Vie future.