Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/28

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deux côtés. Or, comme le Christianisme domine dans le monde depuis un grand nombre de siècles déjà ; comme c’est sous ses yeux et, le plus souvent, avec son concours, que de grandes réformes sociales et morales se sont accomplies, on en conclut magistralement que lui seul contenait en germes toutes ces réformes. Et l’on ne se soucie pas de rechercher, si, en réalité, lui qui leur a donné naissance, ou bien s’il ne les a pas trouvées renfermées en principe dans le sein d’une religion qui fut sa mère, et d’où il les a tirées pour aider seulement à leur développement et contribuer à leur triomphe définitif. La conclusion, on le voit, est quelque peu précipitée. On ne s’en est pas moins fait faute de la tirer, et cela, bien entendu, au mépris des textes le plus précis et les plus formels.

Pourtant, en présence de ces textes, un seul des apologistes du Christianisme a montré quelque hésitation. C’est Bossuet, qui savait si bien estimer la valeur d’une parole des Saintes Écritures. Écoutons-le attentivement quand, dans son magnifique discours sur l’histoire universelle[1], il en vient à comparer la mission de Moïse avec celle de Jésus. Voici la substance de ce qu’il dit à ce sujet :

Les Juifs étaient trop charnels, trop abrutis, trop livrés aux sens et à leurs plaisirs, pour qu’on pût élever parmi eux en dogme la croyance aux félicités futures. L’immortalité de l’âme a été en tout temps et chez la plupart des peuples de la terre, trop féconde en erreurs et en superstitions, pour qu’on ne dût pas en refuser la connaissance aux Hébreux du temps de Moïse encore trop enclins à l’idolâtrie. Il fallait d’abord les attacher à Dieu par l’espoir de récompenses toutes temporelles, les initier à la véritable connaissance de ce

  1. Au chapitre intitulé : Jésus-Christ et sa doctrine.