Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/283

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

graveras dans ton cœur et tu les inculqueras à tes enfants.[1] » Ne fait-il pas un généreux effort pour arrêter Israël sur la pente du mysticisme ? Ne semble-t-il pas vouloir lui faire comprendre par ces dernières paroles, qu’il ne suffit pas d’être fervent adorateur de Dieu, qu’il faut aussi que l’on soit citoyen fidèle et dévoué, ami sincère de l’humanité ? Et avant Moïse, quand Abraham quitte sa patrie, après y avoir vainement publié la connaissance du vrai Dieu, et qu’il s’aventure chez des peuples idolâtres et inhospitaliers pour essayer de la leur faire partager avec plus de succès, n’a-t-il pas accompli dignement sa tâche d’être moral et responsable ? S’en serait-il mieux acquitté en fuyant les hommes et en cherchant, dans la solitude d’une Thébaïde, le loisir et l’occasion de s’unir à Dieu dans de mystiques contemplations ! Et enfin les prophètes, après Moïse, qui ont affronté tant et tant de fois le courroux des rois impies et despotes, en allant jusqu’à la porte de leurs palais, leur reprocher leurs crimes, pourquoi s’étaient-ils senti ainsi le devoir de combattre pour la vérité, au péril de leur tête ? Parce qu’ils avaient compris l’esprit de la doctrine israélite qui, précisément par le profond amour qu’elle nous inspire pour Dieu, nous prépare admirablement au culte de la vertu et à ces actes de dévouement et d’abnégation dont l’exemple a toujours une efficacité si sûre, si forte et si étendue. C’est là le véritable et divin but du Judaïsme : « Aimez le Seigneur, nous dit-il, et par votre amour, gagnez-lui le cœur de vos semblables ; faites respecter son nom, adorer sa majesté, admirer sa grandeur, sa sagesse et sa bonté. Instruisez-vous, honorez la science, soyez dévoués à chacun, doux et persévérants envers le prochain, afin de glorifier par votre conduite celui qui a

  1. Deut., chap. VI, v. 4 à 10.