Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/350

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se dire : Je m’entretiens du produit de mes bras et je conserve ma dignité personnelle en me nourrissant moi et ma famille à la sueur de mon front.

La conservation de la dignité personnelle, c’est effectivement un des points sur lesquels le Judaïsme aime à insister comme essentiel à un ponctuel accomplissement de nos devoirs envers nous-mêmes. Que le travail contribue puissamment à nous donner le sentiment de cette dignité, c’est ce que, nous l’espérons, du moins, on ne voudra plus contester maintenant. Déjà l’attention de la part de Dieu qui, pouvant maudire l’homme à cause de sa désobéissance comme il a maudit le serpent, ne prononce pourtant de malédiction que contre la terre, suffit à montrer qu’il n’y a point sur le globe d’êtres qui soient plus respectables, ni qui aient plus le devoir de se respecter que le couple humain ; car, la femme non plus n’a pas été maudite par Dieu, malgré son péché et la pernicieuse séduction que dans la légèreté et l’insouciance naturelles à son sexe, elle a exercée sur son trop crédule ami. Que dit Dieu à la femme ? « Je multiplierai tes grossesses et tu enfanteras avec douleur ; tu seras attirée vers ton époux et lui te dominera[1]. » Sans doute le mécontentement de Dieu se lit au fond de ces sévères paroles ; c’était le moins que méritait la désobéissance d’Ève. Mais comme le Seigneur joint tout de suite la douceur à la menace, au lieu de la maudire, c’est un trésor d’amour qu’il met au cœur de la femme. Ses grossesses se multiplieront parce qu’elle aimera beaucoup ; elle aura de douloureux enfantements, mais que sa prodigieuse affection de mère et le caressant attachement d’une charmante famille lui feront bientôt oublier. Adam et Ève gardant leur dignité après le péché ; Adam appelé à la conserver

  1. Genèse, chap. II. v. 19.