Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/383

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dans le Coran. Il est de fait que tous deux ont eu devant les yeux la Bible qui fut la source de toutes leurs inspirations. Mais tandis que Mahomet y lisait sans toujours la comprendre, Jésus la comprenait quand il le voulait et que cela ne dérangeait pas ses vues réformatrices. Celui-ci avait été élevé sous sa tutelle, celui-là la consultait seulement parce que son esprit perspicace lui avait fait entrevoir chez elle des points qui pouvaient servir à ses desseins. Tandis que l’un, avec une hardiesse inouïe, se permettait tantôt de négliger la lettre de la Loi pour son esprit, et tantôt de sacrifier cet esprit même à d’impies compromis avec l’erreur païenne, l’autre en travestissait quelquefois tout ensemble et l’esprit et la lettre, et cela encore plutôt par ignorance que par système. Au moins, Jésus avait-il cet avantage, sur Mahomet, d’avoir été instruit du véritable esprit de la Bible, et d’avoir su y rester fidèle quand il le jugeait bon et utile à son dessein.

C’est ainsi que pour la charité il n’a fait que continuer la tradition reçue. Il savait fort bien que ce n’était pas seulement d’aumônes que les Saintes-Écritures voulaient parler quand elles prononçaient le mot de charité, mais encore d’amour, de protection accordée aux inférieurs, de générosité témoignée aux supérieurs dans notre manière d’apprécier leurs actions, leurs démarches et même leurs intentions, enfin, de douceur manifestée à l’égard de ceux qui nous ont offensés. Le pardon des injures, la commisération pour le malheureux, la sollicitude pour l’ignorant, un zèle toujours ardent à secourir le pauvre et à accomplir le devoir, soit envers les morts, soit envers les vivants, envers les petits comme envers les grands, envers l’indigène comme envers l’étranger ; il savait que tout cela était pratiqué de temps immémorial dans la Synagogue, et il n’a fait que répéter après elle ce qu’il avait appris d’elle.