Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/426

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instruits et qui seront renommés autant par leur science que par leur fortune. Rabbi Méir dit : Si quelqu’un t’objecte que Dieu ferait mieux de nourrir lui-même les pauvres, que de promettre des récompenses à ceux qui le font à sa place, tu répondras qu’il ne laisse subsister les pauvres que pour devenir une occasion de mérite pour l’homme riche. Turnus Ruphus fit un jour la question suivante à Rabbi Akiba : Si votre Dieu aime les pauvres autant que vous le dites dans votre religion pourquoi ne s’occupe-t-il pas personnellement de les entretenir ? A quoi l’intelligent docteur répondit par la réflexion même de Rabbi Méir que nous venons de citer, et il ajouta cet ingénieux apologue : Un roi a un fils qui lui cause beaucoup de mécontentement ; dans la colère qu’il ressent un jour contre lui, il ordonne de le jeter en prison et de le priver de toute nourriture absolument. Un ami du roi enfreint pourtant cette défense et nourrit régulièrement le malheureux fils. Chaque jour, il lui apporte à boire et à manger. A quelque temps de là le roi, sentant son courroux apaisé, se souvint de son fils. Il est bienheureux de le retrouver en vie, et comble de présents celui qui le lui ai conservé comme malgré lui[1]. »

Quelle admirable et féconde charité que celle qui a su dicter de semblables paroles ? Et qu’ont les Évangiles de plus beau et qui surpasse dans sa portée ces préceptes et ces exemples d’amour fraternel ? Ah ! que Jésus avait aisé de faire son beau discours sur la montagne avec de pareils modèles devant les yeux, et le cœur pénétré de tant de nobles enseignements qu’il avait puisés dans la Loi, dans les prophètes et dans les écoles religieuses de la Palestine ! Oui, tout, absolument tout, lui est

  1. Voir Talmud, traité Baba Bathra, pages 9 et 10. Comparer Midrasch Raba sur Schemoth, p. 31.