Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/448

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

douloureuse des situations. Oh ! les cruels, dirions-nous si réellement ils avaient jamais existé ! Mais passons. Admettons l’existence de ce sacrificateur et de ce lévite qui sûrement n’ont jamais eu de réalité que dans l’imagination de Jésus ou de Luc l’évangéliste. Sans doute, ce sera maintenant au tour d’un simple hébreu à passer devant l’homme dépouillé et meurtri de coups. Il n’en est rien. Peut-être un simple et modeste croyant comprendra-t-il mieux son devoir d’humanité qu’un prêtre prévaricateur et un lévite si peu charitable ? Mais non, il ne sera plus question d’un Hébreu, d’un coreligionnaire. Ce sera un samaritain qui verra le malheureux exposé sur la route, qui sera touché de compassion, s’approchera de lui, sondera ses plaies pour y verser de l’huile et du vin, le mettra sur sa monture, le mènera à une hôtellerie, prendra soin de lui, et le lendemain, en partant, donnera encore à l’hôtelier deux deniers d’argent en promettant de se charger de toutes les dépenses ultérieures. Et Jésus de s’écrier : Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé entre les mains des voleurs ? La réponse ne se fait pas attendre. Le docteur dit C’est celui qui a exercé la miséricorde envers lui. Et les autres donc, demanderons-nous, ceux qui n’ont pas exercé la miséricorde. le sacrificateur et le lévite imaginaires, ils ne seront plus notre prochain ! Nous pourrions donc, si nous les rencontrions jamais dépouillés et blessés, les laisser gémir, se lamenter et passer sans faire attention, sans nous émouvoir de leurs souffrances ; parce qu’ils n’ont pas été miséricordieux, nous aurions le droit de pas l’être vis-à-vis d’eux ; parce qu’ils n’ont pas prêté assistance, nous pourrions ne pas les assister ! C’est pourtant là la conséquence qui se trouve au bout du récit de Luc, et que nous sommes loin de la morale juive recommandant si expressément de ne pas rendre le mal pour le mal, et